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TRANSMISSION DU PATRIMOINE TUNISIEN

UNE BIBLIOTHÈQUE

DU JUDAISME  TUNISIEN A  SARCELLES,

Q. Une bibliothèque du judaïsme Tunisien vient d'ouvrir ses portes à Sarcelles. Qui l'a fondée ?

R. En effet, la bibliothèque fonctionne depuis quelques mois à l'oratoire tunisien Bet Chalom, Ateret Paz de la Synagogue de Sarcelles. Elle a été fondée à la mémoire de Rabbi Fradji Haccoun qui fut greffier au 'Tribunal Rabbinique de Tunis pendant de longues années et qui était un fidèle'de cette Synagogue: C'est la 2e Bibliothèque du Judaïsme Tunisien après celle de Bet El au 3, rue Saulnier à Paris qui, elle, existe depuis fin 1988. Les 2 bibliothèques sont l'oeuvre de la Yéchiva Kissé Rahamim de Bné Brak qui veut diffuser en France le patrimoine rabbinique de la Tunisie.

Q. Parlez-nous un peu de cette Yéchiva Kissé Rahamim.

R. Pour cela, il faut faire un peu d'histoire. La Yéchiva Kissé Rahamim a été fondée à Tunis en 1962 par Rabbi Masliah Mazouz. Elle comptait environ 40 étudiants quand, en 1971, son Roch Yéchiva fut assassiné dans les rues de Tunis par un palestinien. La Yéchiva fut aussitôt transférée en Israël par les soins des fils du Rabbin Mazouz. Tout d'abord minuscule, la Yéchiva a grandi peu à peu jusqu'à la construction, il y a plusieurs années du grand bâtiment actuel au 26 Rehov Ouziel à Bné Brak. Près de 250 élèves y reçoivent maintenant une formation rabbinique classique conforme à la tradition sépharade.

Outre cet angle, somme toute, commun à toutes les Yêchivots, elle a ouvert un institut, le Makhon Arav Masliah, qui s'est fixé comme but de rééditer les oeuvres fondamentales du Grand Rabbinat de Tunisie ainsi que d'imprimer les manuscrits découverts ces dernières années. Ce travail est précédé par une activité

intensive de relecture, de corrections et d'ajouts, réalisée par une équipe de rabbins dirigée par le Gaon Rabbi Meir Mazouz chlita, Roch Yéchiva de Kissé Rahamim et juge au Tribunal Rabbinique de Bné Brak. La Yéchiva a fixé comme but à la Bibliothèque du judaïsme Tunisien de distribuer en France tous les livres des Rabbins tunisiens édités en Israël et de lancer dans l'hexagone les souscriptions pour les livres édités par le Makhon Arav Masliah. Ainsi cet institut a déjà réédité, Mich'ha Dérabouta de Rabbi Messaoud El Fassy qui fut Grand Rabbin de Tunis jusqu'en 1775. Pour cela, la B.J.T. a édité, il y a quelques mois, une brochure pour faire connaitre ce

Grand Rabbin et son oeuvre.

Q. Comment fonctionne cette bibliothèque ? Peut-on emprunter des livres ?

Notre but est surtout de faire acquérir ces livres pour faire connaître ce patrimoine rabbinique. Le terme de  bibliothèque signifie que nous ne vendons pas du  tout les livres qu'on trouve chez les libraires juifs, mais seulement les ouvrages des rabbins tunisiens et à nos adhérents seulement. Les 2  bibliothèques sont d'ailleurs tenues par des bénévoles

Q. Quel public recherchez-vous ?Peut-on trouver des livres sur le folklore tunisien à la BJT ?

R. Notre public représente principalement les érudits qui recherchent la tradition sépharade d'origine. Plusieurs de nos acheteurs veulent également offrir ces livres à leur synagogue, à leur cercle d'études juives ou à la Yéchiva française qu'ils soutiennent. Pour le Yom Hatora de novembre 1991, organisé par le Grand Rabbin Joseph Sitruk chlita, Grand Rabbin de France, la B.J.T. a édité un catalogue. Il peut être adressé gracieusement sur simple demande écrite ou téléphonique à l'Association.

Pour revenir au folklore, ce que l'on peut appeler tradition populaire, Kîssé Rahamim a édité, il y a quelques années un livre en français, Kandil qui raconte la vie de 2 sommités rabbiniques de Tunisie : Rabbi ls'hak Hay Taïeb Lo Met et Rabbi Yéchoua Bessis. Ce livre, encore disponible, est surtout destiné aux jeunes Bar Misvah, collégiens et aux adultes francophones.

           Plus récemment, le Makhon a réédité Brit Kehouna de Rabbi Khalfon Moché Acohen, le livre qui rassemble toutes les coutumes rabbiniques de Djerba, livre que nous envisageons de traduire en français.

           Par ailleurs, la Yéchiva a produit des cassettes de musique orientale avec des piyoutim d'Acher Mizrahi,

qui sont très prisées par notre public. Uessentiel de notre effort est quand même la distribution des livres d'études rabbiniques et le soutien de l'activité de réédition du Makhon.

Q. Ce travail de réédition touche t -il tous les publics ? N'est -il pas réservé à une élite rabbinique?

R. Non, pas du tout. Il est vrai que ces livres sont surtout achetés par des Rabbins attachés à la tradition sépharade et en particulier tunisienne, mais ils servent également à beaucoup d'historiens pour étudier la vie sociale des communautés juives d'Afrique du Nord au 18e siècle. Uétude des questions religieuses témoigne, en effet, des préoccupations socio-économiques de ces communautés.

De plus, beaucoup d'historiens participent, euxmêmes, à cet effort de publication. Ainsi le Professeur lshak Abrahami, du Makhon Yad Tabenkin, a offert un manuscrit absolument fabuleux à la Yéchiva Kissé Rahamim en vue d'édition. Il s'agit d'un Index au livre Michkénot Aro'im de Rabbi Ouziel Elhaik que de nombreux rabbins contemporains ont tenté de réaliser sans y parvenir.

De même, le Professeur Mikhal Sarraf, du Makhon Aberman, qui est l'auteur de la version hébraïque de Kandil, en a permis la traduction au profit de la Yéchiva Kissé Rahamim.

On voit par là que ce travail rassemble les forces vives de tous les originaires de Tunisie en vue de faire connaître leur patrimoine.

Q. La tradition tunisienne.estelle connue en Israël ?

R. Avant l'installat ion de la Yéchiva Kissé Rahamim en Israël en 1971, elle était ignorée et réservée à quelques Rabbins sépharades qui possédaient certaines éditions originales.

Ce travail de réédition la fait mieux connaître. Surtout, la Yéchiva contribue, depuis quelques années, à redorer le blason de cette communauté. Elle permet aussi d'introduire ce patrimoine auprès du monde rabbinique israélien qui commence à l'apprécier : l'ancien Grand Rabbin d'Israël, Rabbi Ovadia Yossef a accordé une préface très élogieuse au livre Malkhé Tarchich l'encyclopédie du Judalisme rabbinique de Tunisie ; cet ouvrage a pour auteur Rabbi Benjamin Cohen chilta, l'adjoint du Grand Rabbin de Nétivot. Il retrace en 400 pages la biographie de près de 1000 Rabbins de cette contrée d'Afrique depuis l'époque biblique jusqu'à nos jours. Il vient d'être réédité et se trouve dans nos rayons. Rabbi Mordekhay Eliaou l'ancien Grand Rabbin Sépharade d'Israël, a participé personnellement chaque année, le 21 Tévet, à la Hilloula de Rabbi Masliah Mazouz zal à la Yéchiva. Rav Chmouel Alevy Wozner, un rabbin achkénaze bien connu à Bné Brak a écrit une préface au livre Michpat Katouv de Rabbi Israël Zeitoun que le Makhon a édité en 1980. Il y raconte l'érudition profonde et la finesse d'analyse du Tribunal rabbinique de Tunis que Rabbi Israël Zeitoun présida de 1898 à 1917 avant de devenir Grand Rabbin de Tunisie jusqu'en 1921.

Ces trois exemples illustrent bien les progrès accomplis depuis 20 ans dans la connaissance de cette tradition.

Q. Et en France, où en est cette tradition ?

R. Elle est bien connue de ceux qui l'ont reçue directement dans leur communauté d'origine. Dans certains milieux religieux, elle est encore peu répandue par

manque d'étude et de livres. C'est ce vide que veut combler la bibliothèque du Judaïsme tunisien.

Q. Vous parlez beaucoup des institutions et des actions, beaucoup moins de ceux qui les mènent.

R. Effectivement, tout cela est réalisé par le Gaon Rabbi Meir Mazouz chlita, Roch yéchiva de Kissé Rahamim et l'équipe de Rabbanim qu'il dirige.

'N'oublions pas les nombreux bénévoles qui,. en Israël et en France, consacrent du temps à aider la Yéchiva et le Makhon.

Cette oeuvre vit aussi grace à la générosité des donateurs, de plus en plus nombreux à apprécier l'envergure de cette institution.

Pour en revenir au gaon, et malgré, la modestie et la simplicité proverbiale des Rabbins de Tunis, signalons quand-même qu'il fut à l'âge de 17 ans Roch yéchiva de la Yéchiva Loubavitch de Tunis. Il est, depuis plusieurs années, juge au Tribunal Rabbinique de Bné Brak.

De toutes parts dans le monde, on sollicite son avis sur la tradition ancestrale sépharade dans le domaine de la Halakha. Dans le catalogue dont nous avons parlé tout à l'heure et qui est encore disponible, il y a un cours, traduit en Français, sur cette tradition, sous la forme de questions et réponses courtes.'Récemment, on lui a proposé de hautes responsabilités au Grand

Rabbinat d'Israël, poste qu'il a refusé pour ne pas quitter la Yéchiva et le Makhon.

Q. En conclusion, que devrait amener cette bibliothèque du judaïsme tunisien dans la vie spirituelle de la communauté ?

R. Tout d'abord, des ouvrages de référence sur tous les domaines d'étude rabbinique: les commentaires du Talmud, les avis des décisionnaires tunisiens sur toute la Halakha, quelques livres sur la grammaire, le calendrie ' r ou la Kabala; plusieurs cassettes de Plyoutim également.

Mais aussi, la possibilité d'acquérir Immédiatement tous les livres édités par le Makhon. Surtout et enfin, une meilleure connaissance de la tradition religieuse de Tunis et de Djerba. L'enjeu est de taille : c'est celui de la transmission du patrimoine rabbinique sêpharade à la jeunesse pour le dévélopper au sein du peuple juif.

 

Bibliothèque du Judaïsme Tunisien :

- Synagogue de Sarcelles Oratoire tunisien

74, avenue Paul Valéry 95200 SARCELLES

- Synagogue Bet El

3, rue Saulnier - 75009 PARIS

Adresse Postale : Association KISSE RAHAMIM bibliothèque

39, Avenue du Château 95200 SARCELLES - Tél.: 39.86.40.69

 

 

 

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